Langue paternelle d'Alejandro Zambra (Literatura infantil)
/image%2F1102819%2F20250525%2Fob_a16b44_langue.jpg)
C’est à quarante-deux ans, alors qu’il n’envisageait pas d’être père, que l’auteur découvre la paternité par l’intermédiaire de la naissance de son fils.
Il commence à écrire, des réflexions qui lui viennent, comme ça, au fil des jours, puis des textes un peu plus longs, des poèmes. On suit ainsi son quotidien bouleversé par l’arrivée de ce petit être. Tout est reconsidéré, revisité. Petit à petit, c’est la relation qu’il a lui-même construit avec son père qui est mise en avant. Il élargit ses pensées à d’autres hommes et leur progéniture, il partage avec le lecteur ce cheminement. Tout n’est sans doute pas totalement vrai, c’est son interprétation au jour J lorsqu’il écrit, mais peu importe car tout s’articule autour de l’amour des pères.
Il parle du regard qui se modifie lorsqu’on donne la vie, des priorités qui ne sont plus les mêmes. Il évoque la transmission, la mémoire, les changements de vie et les amitiés qui évoluent en fonction de ce qu’on souhaite, de ce que comprennent les amis de nos décisions. Certains choisissant de faire passer leur activité professionnelle avant leurs enfants (les femmes étant présentes pour palier au manque), d’autres au contraire, assumant totalement leur « nouveau rôle ». Ce qui est de plus en plus fréquent. Autrefois, les pères apprenaient à leur fils à être un homme, mais pas à être un père…
Toute la première partie du livre est consacré à ce tsunami qu’a été cette découverte de la paternité. C’est un véritable message pour son fils, et lorsqu’il le découvrira, ce sera un cadeau inestimable.
L’écriture (merci à la traductrice) est sincère, fluide, intéressante. Les sujets évoqués renvoient chacun à sa propre histoire, soit en tant qu’enfant, soit en tant que parent.
Dans la seconde partie, il y a d’abord l’amitié de deux enfants, puis d’autres petits récits avant de revenir à des événements plus personnels. L’auteur explore toujours le lien filial mais sous d’autres formes.
J’ai aimé le parallèle entre la littérature enfantine et le lien filial. Alejandro Zambra fait presque de la philosophie lorsqu’il en parle ! C’est beau et poétique !
L’ensemble est une lecture émouvante, où cet homme se confie, et se révèle jusqu’à l’intime. Il ose dire ses peurs, ses doutes, et il offre ses petits bonheurs, ses victoires. C’est à la fois doux et délicat mais aussi empreint d’un humour fin qui apporte le sourire aux lèvres.
« - Pourquoi tu as voulu avoir un enfant ?
Au cours de ces petits mois, ce sont bien quinze personnes qui m’ont posé la question.
- En réalité, c’est grand-père que je veux être, on n’en est qu’à la phase préparatoire, je leur réponds, par exemple.
Ou bien :
- Parce que j’en avais marre des chats. »
Avoir un enfant c’est devenir responsable, c’est savoir qu’on donnerait sa vie pour le sauver, c’est tenir sa main dans la notre pour l’accompagner, le soutenir pendant qu’il grandit, c’est savoir s’effacer quand il le faut tout en étant présence si besoin.
C’est tout cela que nous découvrons ou redécouvrons dans ce livre à la fois témoignage, biographie, roman, donc inclassable mais à découvrir sans aucun doute.
Traduit de l’espagnol (Chili) par Denise Laroutis
Éditions : Christian Bourgois (15 Mai 2025)
ISBN : 978-2267054750
256 pages
Quatrième de couverture
Alors qu'il avait toujours repoussé l'idée d'avoir des enfants, Alejandro Zambra devient père à quarante-deux ans. Bousculé dans ses certitudes, il consigne l'état dans lequel le plonge cette période unique, pour mieux la saisir et en laisser une trace concrète à son fils. À l'ère de l'instantané, qui change notre rapport à la mémoire et à ces premiers moments de vie, il s'interroge : que faut-il transmettre à ses enfants et quelle part de mystère garder ?