Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Pages

Publié par collectif-litterature

Karine Dabadie est a exercé une dizaine d’années comme urgentiste à Bordeaux avant de se décider pour une carrière de légiste. Elle a créé et dirigé, de 2010 à 2016, l’Institut de médecine légale de Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) dans le cadre duquel elle a mis en place un protocole novateur de signalement des violences conjugales. En collaborant avec Macha Séry, une journaliste, elle a écrit ce livre où elle présente des cas étudiés en tant que médecin légiste. Mais elle va beaucoup plus loin en nous offrant une réelle réflexion sur les victimes de violence (au sein du couple, en famille ou autres) ainsi que le rapport au corps vivant ou mort. Elle s’interroge sur ce qui est mis en place pour accompagner les victimes et ce qu’il faudrait encore faire…

Elle le dit elle-même, elle n’a pas l’allure (qu’on imagine) d’une médecin légiste. Cheveux blonds, talons (des stilettos), tenues féminines, elle est « femme » et ne cache pas son corps. Cela ne l’empêche pas d’être experte dans son domaine. Elle explique que, contrairement à ce qu’on lit souvent dans les romans, la médecine légiste est utilisée pour d’autres cas que les meurtres. Dès qu’il y a une mort suspecte, elle doit agir et avec ce qu’elle observe, tirer des conclusions. Ce n’est pas simple, il peut s’agir d’enfants, de personnes en mauvais état mais ce qu’on lui demande, c’est d’être professionnelle.

« On doit aux morts de respecter leur corps. Car sur chaque corps s’imprime un parcours de vie. »

Quand elle dissèque - appelons les choses par leur nom - elle agit en tant que légiste, elle doit laisser ses émotions de côté pour comprendre ce qu’il s’est passé. Elle parle du cas d’une petite-fille maltraitée et elle écrit :

« Je ne lui ai pas redonné vie mais un peu d’existence passée. »

Ses observations ont permis de condamner la belle-mère tortionnaire. C’est une forme de réparation. En étant à « l’écoute » de ces corps, n’a-t-elle pas « réparé » le sien qui avait souffert ? En comprenant l’histoire des femmes qui lui sont confiées, elle agit pour celles qui pourraient être confrontées aux mêmes situations. Elle a également mis en place des actions concrètes pour les aider avec la création d’un protocole innovant. Sa carrière et ses actions sont exceptionnelles.

Dans les différents « affaires » qu’elle évoque, ce qui transparaît, au-delà de son analyse des blessures, des traces de coups, c’est le respect qu’elle a pour la personne qu’on lui confie. Avant d’être un corps, l’individu a été vivant et elle ne l’oublie pas en voulant cerner son vécu lors des derniers jours ou des dernières heures. Cette attention prodiguée à chacun, chacune, la guide et la porte pour avoir un regard juste afin de découvrir la vérité.

J’ai lu ce recueil d’une traite. L’écriture est prenante. Certains passages font froid dans le dos, il est difficile d’imaginer tout ce que subissent certains souffre-douleurs. Parfois, Karine Dabadie explique ce qui a provoqué cette barbarie (un enfant issu d’une autre union par exemple), c’est terrible. C’est un témoignage fort, édifiant et je ne regrette pas ma lecture.

 

Éditions : Globe (17 Avril 2025)
ISBN : 978-2383613152
208 pages

Quatrième de couverture

Karine Dabadie est médecin légiste et, par ses expériences et ses réflexions, elle interroge notre rapport aux morts, mais aussi aux vivants. Cassant les représentations réductrices qui entourent son métier, elle se livre sur son quotidien et replace au centre de sa profession les notions de respect des corps et d’écoute qui l’animent, et qui sont indispensables à son travail auprès des femmes victimes de violences sexuelles et sexistes.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article