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Publié par collectif-litterature

Maddi est un livre magnifique, librement inspiré de la vie de María Josefa Sansberro, née à Oiartzun en 1895. L’auteur, historienne espagnole, a reçu des documents sur cette femme et sa cousine et après les avoir consultés, après avoir écouté ceux qui les lui avaient transmis, elle a décidé de rédiger ce roman. C’est pour elle une façon de donner une existence à toutes ces témoins disparues, oubliées, en leur rendant hommage. Elle explique sa démarche dans les dernières pages et c’est très intéressant.

Ancré dans un contexte historique riche, ce récit est un très beau portrait de femme.
Maddi choisit de partir pour vivre autre chose que ce à quoi elle était destinée en tant que fille de paysans. Son vélo, une petite valise et la voilà qui débarque vers Louis qui tient un hôtel. Il est plus âgé qu’elle, elle l’aidera au bar, à faire les chambres, la vaisselle, la cuisine…  On est en 1929, ça ne se fait pas une jeune femme qui décide, qui tient tête, qui refuse ce qu’on lui a imposé mais elle s’en fiche Maddi, à un peu plus de trente ans, elle veut se sentir libre. Peu importe les regards de travers. Que fait-elle avec cet homme plus vieux, y-a-t-il quelque chose entre eux ? Sa réputation ? Elle n’attache pas d’importance à ce que les gens pensent, pourvu qu’on la laisse tranquille.

Ce n’est pas facile mais elle est volontaire, tenace, exigeante avec elle-même. Un événement va bouleverser le quotidien de Louis et Maddi. Ils vont de voir faire des choix forts, qui les engagent mais ces deux-là ne baissent pas les bras. Ensuite, viendra la guerre et l’hôtel sera réquisitionné. Que faire ? Maddi connaît la forêt, les sentiers, elle peut aider à combattre l’ennemi, quitte à prendre des risques. Alors, elle agit parce qu’elle veut continuer à se regarder dans une glace, parce qu’elle croit en la force du combat des résistants.

Maddi n’a pas été la seule à se battre contre le fascisme. En lui donnant la parole (le texte est écrit à la première personne du singulier), l’auteur nous rappelle toutes celles qui ont fait la même chose et qui n’ont pas forcément de plaque commémorative (Maddi en a une seulement depuis 2021). L’écriture (merci à la traductrice) fluide, engagée, donne une place importante aux femmes, on sent la féministe qui parle entre les lignes.

C’est une histoire qui prend aux tripes, qui émeut (j’ai même pleuré). Le style de l’auteur est prenant. Elle s’est appropriée la personnalité de Maddi, comme si elle était de sa famille. On la suit dans son quotidien difficile, fait de luttes, de peur, de doutes, mais jamais de résignation. Il y a une photo en noir et blanc de sa cousine (très présente dans le recueil également) et elle. J’imagine Maddi le regard vif, droite dans ses espadrilles, refusant d’obéir aux bien-pensants, capable de secouer les hommes, de réagir vite et bien en cas de coup dur, sachant aimer ceux qui en ont besoin, tissant des liens solides avec ceux à qui elle fait confiance.

Le destin de Maddi m’a émue, bouleversée, je ne peux que remercier Edurne Portela de l’avoir présentée avec son cœur parce qu’elle a fait battre le mien plus fort tant je me suis attachée à Maddi, tremblant pour elle et ceux qu’elle aimait.

 

Traduit de l’espagnol (Espagne) par Marianne Million
Éditions ; Liana Levi (7 Mars 2024)
ISBN : 979-1034908837
272 pages

Quatrième de couverture

Elle ne sait pas ce que l’avenir lui réserve, Maddi, quand un beau jour de 1929 elle débarque au pied de La Rhune. Cette fille de paysans basques veut simplement échapper à une vie de résignation. Rebelle et anticonformiste, elle est bien décidée à mener sa barque à l’hôtel-restaurant du col de Saint-Ignace. Mais bientôt l’Espagne voisine, puis l’Europe tout entière vont s’embraser. Alors cette habituée des sentiers de contrebande fera passer documents et humains à travers la frontière toute proche, même après 1940, quand son hôtel sera réquisitionné par des officiers allemands.

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