Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Pages

Publié par collectif-litterature

Toni Morrison a obtenu le prix Pulitzer avec ce roman. Elle a été prix Nobel de littérature en 1993. Elle est décédée en 2019.
Beloved est paru en 1987. Une nouvelle traduction vient d’être faite par Jakuta Alikavazovic (merci à elle) et lorsqu’on lit la postface qu’elle a rédigée, on sait qu’elle a voulu donner à ce roman, toute sa force, toute sa vitalité, tout ce que Toni Morrison voulait faire vivre. Ce récit est inspiré de l’histoire vraie d’une ancienne esclave : Margaret Garner.

La première fois que j’ai lu Toni Morrison avec « Un don », j’avais écrit :  La narration désarçonne, déconcerte, perturbe dans un premier temps et puis l’écriture envoutante de l’auteur nous emporte, nous submerge, nous transporte …. Je réitère car le ressenti à est le même. Il faut prendre le temps de lire, de laisser les personnages, les différentes voix, s’exprimer et les écouter.

Tout se déroule sur une vingtaine d’années, entre 1855 et 1873 dans l’Ohio. Mais rien n’est linéaire, les analepses sont légion. Elles nous éclairent sur le passé, le vécu douloureux de chacun. Rien n’indique ces retours en arrière, c’est au lecteur d’être vigilant pour que tous puissent lui parler, lui murmurer ou lui crier leur douleur, leur peur, leur haine, leurs espoirs …..

Beloved, Bien Aimée, c’est le seul mot qui a été inscrit sur la tombe de la fille de Sethe. Elle a choisi de la tuer pour qu’elle ne subisse pas, comme elle, l’esclavage. Mais la culpabilité ne la quittera pas et rejaillira sur ses autres enfants. Comment vivre avec ce choix atroce ? Dans la maison où elle habite, au 124, un fantôme sembler être présent. « Le 124 était malveillant. ». Et puis, un jour, une jeune femme débarque, elle dit s’appeler Beloved… Cette inconnue est-elle là pour mener Sethe vers la rédemption ?

Le texte parle des esclaves, de ceux qui ont été affranchis ou pas, des difficultés de vivre avec les remords. La maternité et le rôle des parents sont évoqués. Sethe est émouvante. Elle a tué par amour mais son geste la hante, elle pourrait sombrer dans la folie. Il faut resserrer les rangs autour d’elle.

Le style est atypique, parfois des phrases sans verbe, des mots qui se suivent sans ponctuation, des lignes comme un poème. C’est beau et bouleversant, empli de sensibilité. On avance, on recule, on change de protagonistes, ce n’est pas aisé à suivre mais c’est intéressant de combler les blancs, de reconstruire les événements, de se faire une idée globale avant de découvrir la suite et avoir tous les éléments. Il faut faire avec les souvenirs, qui peuvent être déformés …

J’ai eu le sentiment d’un cri tout au long de ma lecture. Toni Morrison s’attache à nous faire comprendre qu’au-delà des faits décrits, il y a aussi ceux qui sont tus, cachés, voire oubliés. Elle réhabilite ces hommes et ces femmes, victimes de l’esclavage, elle leur donne vie, elle leur donne la parole à travers ceux qui peuplent son roman. L’histoire ne s’arrête pas à ce qu’on découvre, elle est sous-jacente, les messages de l’auteur sont forts et nous ouvrent les yeux sur une période de l’histoire des Etats-Unis peu reluisante …

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jakuta Alikavazovic
Éditions : Christian Bourgois (19 Octobre 2023)
ISBN : 978-2267050462
452 pages

Quatrième de couverture

Sethe et sa famille vivent avec le fantôme de Beloved depuis des années. Car Sethe a tué sa petite fille de deux ans — pour que jamais elle ne soit esclave comme elle. Depuis, la guerre de Sécession s’est terminée, et dans son petit bourg de l’Ohio, Sethe a beau être libre, elle reste hantée par son geste. Alors, quand une inconnue qui dit s’appeler Beloved frappe à sa porte, Sethe est plus que jamais ramenée à son passé.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article