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Publié par collectif-litterature

« Par la racine », une couverture magnifique, un format de livre agréable, une belle couleur de papier…. Déjà, ça donne envie. Et puis les premiers mots, les premières lignes. Une mélodie dans le phrasé mais également par les extraits musicaux évoqués. Une douce mélancolie, une écriture sensible qui prend le temps, qui pose chaque mot, soigneusement choisi par l’auteur. C’est un érudit, on le sent, on le lit, son vocabulaire est riche sans être prétentieux. La poésie, la musique sont omniprésentes, comme un lien entre l’écrit et la vie quotidienne.

C’est l’histoire de Samuel Willar, un homme qui « tisse des vies », qui « part du vrai pour façonner le faux. » Il rédige des autobiographies, à la demande, arrangeant ce qui est réel pour que ça colle aux aspirations de celui ou celle qui commande l’ouvrage. À la mort de son père, qu’il a toujours appelé Baruch, il trouve une note manuscrite et un numéro de téléphone avec ces quelques mots : Pour Samuel, quand le temps sera venu. Pourquoi ce message pour lui, plutôt que pour son frère ou sa sœur ? Sans doute parce qu’au bout du fil, une personne pourra donner et recevoir, uniquement pour lui, avec lui.

C’est un roman de « racines », de filiations. Celle qu’on connaît, officielle, celle qu’on découvre quand, au décès de nos parents, on se lance sur le chemin de ce qu’ils ont été. Non pas qu’ils aient caché des épisodes, des faits, mais plutôt parce qu’enfant, jeune adulte, et plus tard pris par notre vie, on ne s’attarde pas. Quand vient la mort, on a besoin de réponses, même si on n’a pas de questions. Elles viennent, au fil des rencontres. Samuel fait connaissance avec Luce, comme si, indirectement, son père, Baruch, avait choisi de la mettre sur sa route. Elle a besoin d’une autobiographie « reformulée » pour obtenir un poste en adéquation avec ce qu’elle désire : directrice du YIvo, institut de recherche juive de Manhattan. Il est nécessaire de créer une enfance au kibboutz. Samuel accepte et ils partent tous les deux sur les traces de ce qu’a été la vie de la jeune femme afin d’intégrer des événements réels dans le texte en partie fictif qu’il va écrire. En partant avec elle, il suit en parallèle le cheminement de son père, il remonte le temps. On va aux rendez-vous avec différents personnages qui tous, apportent une pièce au puzzle qui prend forme sous nos yeux. Des liens se font, se défont, se nouent plus ou moins serrés.

« Par la racine » nous rappelle qu’au-delà de notre famille, on se construit avec des « racines » culturelles, amicales, etc. Ce sont toutes ces souches qui bâtissent l’homme ou la femme que nous sommes.

Gérald Tenenbaum écrit avec infiniment de délicatesse et de respect pour ceux qu’il présente. Ses protagonistes emplissent les pages, cousant leur vie, au fil des ans, avec ce qu’ils sont, ce qu’ils deviennent, ce qu’ils souhaitent être, puisant profondément dans la terre de leurs ancêtres et de tous ceux qui comptent pour eux, la force de dire « je suis, je veux… »

Ce dernier recueil de l’auteur est totalement abouti, affirmé dans le propos (notamment les liens avec la culture juive), la construction et la rédaction. C’est une belle réussite et j’ai été conquise.

 

Éditions : Cohen-Cohen (26 Janvier 2023)
ISBN : 9782367491066
200 pages

Quatrième de couverture

Samuel Willar est un écrivain particulier, spécialisé dans la rédaction d'autobiographies imaginaires, tant pour les morts que pour les vivants. Lorsque son père, qui avait peu d'estime pour ce rapiéçage de vies, disparaît à son tour, un numéro de téléphone et une note manuscrite l'orientent vers une nouvelle commande, émanant d'une bibliothécaire de l'institut Rachi de Troyes. Il apparaît rapidement qu'une enquête s'impose, impliquant un voyage en commun à travers la France, l'Italie, la Méditerranée et au-delà.

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