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Publié par collectif-litterature

Une chronique de Cassiopée

 

« Je n’ai pas trouvé meilleur endroit pour prendre le pouls de l’Amérique qu’en son centre, le long du Mississippi. »

En 2016, trente ans après son premier périple (en 1986), Eddy L. Harris est reparti. Avec son canoë, il a décidé de redescendre le Mississippi, de longues semaines de navigation et 4000 kilomètres à pagayer. Qui a le plus changé ? Le fleuve, lui, le pays tout entier ? Les rencontres seront-elles les mêmes ? Riches d’échanges, perturbantes, agréables ? Peu importe, l’essentiel pour lui, c’est de relever ce défi qu’il s’est fixé, de repartir et de réussir.

La première fois, il ne savait pas à quoi s’attendre, cette fois-ci, c’est différent, il connaît les risques, les dangers. Est-ce que ça le rend plus fort ? Pas forcément car la difficulté sera présente et le corps a pris trois décennies, peut-être que l’expérience compensera et l’aidera à faire face aux impondérables.

Il est parti fin août avec son bateau, prêt à se jeter à l’eau, c’est le cas de le dire. Pratiquant un certain fatalisme, l’autodérision et parfois l’humour face au danger, se moquant de ses erreurs, il nous explique le bonheur qu’il ressent seul sur l’eau. Quand il rame, son esprit est libre, il pense, s’évade, analyse. Il ne veut pas revivre la même chose que la première fois. De temps à autre, un souvenir remonte, il en parle mais il ne cherche en aucun cas à reproduire ce qu’il a vécu, il n’est plus le même homme.

Il connaît ses limites, notamment en botanique, ou sur le chant des oiseaux et en zoologie. Cela ne l’empêche pas d’apprécier la nature, ce qu’il voit, de profiter de l’instant avec les carpes qui sautent partout ou le nuage d’éphémères. Il observe, il ramasse du riz avec des indiens, il mange une soupe chez l’habitante qui lui ouvre sa porte, il vit intensément chaque moment de bonheur.

« Mais quelque chose de racial couve dans les recoins obscurs de l’Amérique. »

En filigrane, reviennent régulièrement des réflexions profondes sur le racisme, sur les personnes à peau noire. Sur l’espoir qui a été mis en Barack Obama, un président noir qui pouvait faire, qui allait faire, qu’on a élu deux fois etc… et qui au final l’a déçu…. En repartant sur le fleuve, il voulait voir si le pays avait vraiment changé….

Il y a quand même ces deux paroisses, une blanche, une noire qui sont devenues une seule paroisse. « Pas une église unie mais une église qui unit. » Est-ce que ça suffit pour espérer en l’homme ?

Quels que soient les obstacles, les contrariétés, les désillusions, Eddy L. Harris aime la vie, profondément, et il transmet cet amour dans son écrit. Il vit une relation particulière avec le Mississipi, chaque périple étant l’occasion de se retrouver, de faire le point, de prendre le temps, de se sentir exister. Il le dit lui-même, être arrivé n’est pas la fin du voyage, ça ne se termine jamais.  

« Le voyage est souffrance et plaisir, déception, apprentissage et perte. Il est ce qu’on découvre, ce qu’on laisse, les gens qu’on rencontre, ce qu’on prend et ce qu’on donne, ce qu’on pense. »

L’écriture est magnifique, fluide (merci à la traductrice), clairvoyante, humble, posée, emplie d’humanité. Ce témoignage est intéressant et captivant pour de multiples raisons. Quant à l’auteur, écoutez-le :

Eddy L. Harris parle

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pascale-Marie Deschamps
Éditions : Liana Levi (2 Septembre 2021)
ISBN : 979-1034904402
260 pages

Quatrième de couverture

On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. Eddy le sait. Pourtant il décide, trente ans après une première descente du Mississippi en canoë, de réitérer l’exploit. Mais justement, ce n’est pas l’exploit qui l’intéresse cette fois. Il n’a rien à se prouver. Il veut juste prendre la mesure du temps écoulé. Eddy a changé, le fleuve a changé, le pays a changé.

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