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Publié par collectif-litterature

Khalil, de Yasmina Khadra

 Une chronique de Cassiopée.

« Il ne s’agit pas de comment ça finit, mais de comment ça commence. »*

Avec un ton très juste, sans fioriture inutile, Yasmina Khadra a pénétré dans l’esprit et l’intimité d’un kamikaze, Khalil. Une prise de risque à la mesure de ce grand écrivain qui a réussi un nouveau roman empreint de vérité, même si elle dérange. Aucun jugement, aucun atermoiement,  des faits, rien que des faits … Khalil  a grandi en Belgique mais il ne ressent pas de sentiment d’appartenance à ce pays, dans lequel il arrive qu’on lui fasse comprendre qu’il n’est qu’un étranger.  Que faire pour « être quelqu’un », pour « exister » ? Lorsque de fréquentations en fréquentations, il se retrouve face à des choix, il ne veut pas perdre la face, il suit le mouvement dans un premier temps, puis, de fil en aiguille, il se construit une nouvelle personnalité, persuadé d’être dans le vrai. Pas ou peu de dilemme, plus il avance, plus tout cela lui apparaît comme la seule solution, qui plus est, la meilleure.

« J’étais sur leur chemin, objet perdu, ils m’ont ramassé et m’ont gardé puisque personne ne m’avait réclamé . »

Avec un doigté remarquable, l’auteur pose des mots précis, choisis avec intelligence sur le cheminement de Khalil qui est en recherche, qui veut donner du sens à sa vie. Lui qui vivait de petits boulots, de petits trafics, lui qui vivotait et ne faisait as grand-chose, se retrouve avec un idéal, une contenance. Il devient « visible »…. Le récit nous montre l’évolution intérieure de cet homme, mais également sa métamorphose profonde, la modification de ses relations avec la famille, les amis, les voisins …. A travers ses pensées, ses conversations, on le voit changer, devenir un autre, douter, puis revenir vers ses nouveaux frères….

« Je n’étais plus une épave à la dérive- j’étais de nouveau sur mes rails, parfaitement dans mon élément. »

En employant le « je »,  les paroles et les pensées de Khalil nous percutent de plein fouet. On le sent sur la brèche, de plus en plus versé du côté de la folie, qui pour lui, s’apparente à une forme de bien-être. C’est d’une lucidité terrible tant l’auteur colle au parcours de cet homme, montrant ce qui a pu l’amener à choisir l’inexplicable.  Il n’y a plus de discernement  dans le quotidien de ce futur kamikaze, seul compte son désir, son besoin d’être et pour cela il est prêt à tout….

Ce récit est une réussite, magnifiquement douloureuse,  mais une réussite. L’auteur a pris des risques en choisissant un tel sujet, il le maîtrise à la perfection, ne tombant dans un aucun travers. Son écriture est incisive, précise, poétique de temps à autre,

« La plaine semblait broyer du noir en ce jour sans joie et sans soleil. »

porteuse de sens, profonde, magnifiée par chaque terme employé d’une sobriété toute en retenue, d’une pertinence incroyable. Je ne sais pas comment s’est fait le choix d’un tel thème, comment le récit a été écrit, construit, mais ce dont je suis certaine, c’est que Yasmina Khadra est un excellent explorateur des âmes humaines…

* page 141

 

Khalil
Auteur : Yasmina Khadra
Éditions : Julliard (16 Août 2018)
ISBN : 9782260024224
264 pages

Quatrième de couverture

Vendredi 13 novembre 2015. L'air est encore doux pour un soir d'hiver. Tandis que les Bleus électrisent le Stade de France, aux terrasses des brasseries parisiennes on trinque aux retrouvailles et aux rencontres heureuses. Une ceinture d'explosifs autour de la taille, Khalil attend de passer à l'acte. Il fait partie du commando qui s'apprête à ensanglanter la capitale. Qui est Khalil ? Comment en est-il arrivé là ?

 

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