Les hautes lumières, de Xavier de Moulins
Une chronique de Cassiopée
Un enfant, à quel prix ?
Le ventre de Nina reste sec, vide, pas d’embryon, pas d’enfant…. Elle est française, mariée à Tahar, un marocain. Dans sa famille à lui, il est important, primordial, vital que la femme enfante… Alors, ils se battent, depuis des années, pour lutter contre ce problème d’infertilité. Elle ne peut pas accepter cette fatalité, elle doit avoir un bébé, un petit d’homme à aimer…. Elle a tout accepté, les analyses, les traitements douloureux, les fivettes …. Son corps souffre, transformé par la prise d’hormones, elle a grossi, elle ne s’aime plus mais elle s’obstine, encore et encore….. Ne rien laisser au hasard, essayer jusqu’au bout …. Et attendre le coup de fil de la clinique qui dira s’il y a lieu d’espérer ou pas….
Ce long cheminement est écrit avec infiniment de pudeur par Xavier de Moulins. A points comptés, il décrit la douleur, les doutes, les questions, l’espérance, l’attente, la désillusion...
Et puis le verdict, terrible, comme un coup de semonce, annoncé et énoncé sans fioriture… « Madame, il vous reste l’adoption… » Face à cette nouvelle bataille, les deux membres du couple vont réagir différemment…. Nina poursuit son but : elle veut être mère, à n’importe quel prix….Elle s’en fait une obligation, ne pas décevoir son époux, sa belle-famille, être maman enfin…. Tahar, lui, étouffe, c’est lourd tout cela à vivre…. Il cauchemarde, il a peur pour sa femme….
On sent clairement que ce désir d’enfant « mine » le couple mais pas de la même façon. Chacun a une approche différente, une sensibilité qui n’est pas la même face aux événements… Nina ne travaille plus, tant elle consacre de temps à ce qui est devenu son seul objectif. Lui, il continue de conduire son taxi, de rencontrer des gens…. Ne risquent-ils pas de s’éloigner l’un de l’autre ? Nina ne va-t-telle pas trop loin, se « coupant » presque de son mari et rendant ainsi le dialogue difficile ?
L’auteur avec une écriture lumineuse, ciselée comme un bijou, a trouvé les mots pour exprimer avec délicatesse la route semée d’embuches que Nina emprunte. Il a donné à ses personnages une vie, les rendant humains, fragiles et forts à la fois ….Il a su éviter le pathos, misant avec doigté sur les émotions à fleur de peau de chacun des protagonistes…. Ils ont parfois du mal à partager, à trouver les mots ces hommes et ces femmes qu’ils évoquent…alors un geste suffit, que ce soit une main posée sur la nuque ou une brève étreinte…..
Ce roman douloureux montre quelles cassures et quels liens peuvent apparaître dans une famille lorsque la vie ne se présente pas telle qu’on l’avait imaginée …. Nina traîne son passé ; Tahar, son présent et ils leur arrivent de ne plus se comprendre …. chacun restant dans son monde…. Est-ce que l’arrivée de l’enfant tant désiré va les rapprocher à nouveau ou sera-t-il une fêlure supplémentaire ?
Ce livre est magnifique, non seulement parce que l’auteur traite d’un sujet difficile sous un angle nouveau (et qu’il le fait avec l’intelligence du cœur) mais également parce que le style de Xavier de Moulins est poétique. Avec des phrases courtes, quelquefois un ou deux mots, il fait battre notre cœur au rythme de celui de Nina, avec des hauts et des bas mais gardant comme elle, l’espérance chevillée au corps……
Les hautes lumières
Auteur : Xavier de Moulins
Éditions : Jean-Claude Lattès (4 Octobre 2017)
ISBN : 9782709660594
356 pages
Quatrième de couverture
C’est une histoire d’amour entre ombre et lumières, celle qui unit Nina, la coiffeuse de Bondy, à son mari Tahar, le chauffeur de taxi marocain.
C’est l’histoire d’un combat : Nina ne parvient pas à tomber enceinte, mais est prête à tout pour devenir mère.