Bison, de Patrick Grainville
Une chronique de Cassiopée.
Ce livre est une fresque, une immense peinture où la main de l’écrivain fait vivre ce que voit l’œil du peintre.
Les scènes décrites sont comme autant de tableaux qui se construisent sous nos yeux. Le décor se met en place, l’atmosphère s’installe puis apparaissent les personnages donnant vie à l’ensemble. A ce moment là tout s’anime : sons et lumières …
« Les enfants se chamaillent, se poursuivent, galopinent, jouent à la guerre. On entend le fleuve. Des canards étincelants filent au ras de l’eau. Les saules et les bouleaux bruissent dans une passe du vent. La masse des feuillages ploie, saisie d’un frétillement infini, miroitant. On pourrait rester là , se confondre avec la vie. S’il n’y avait sur la colline ce marcheur obstiné dans sa quête. Alors que la vision semble immédiate, déployée partout, épanouie dans tous les éléments, les sons, couleurs, mouvements accordés, que tout le monde finalement le sent. »
L’écriture est d’une poésie infinie, une musique rythmée par les phrases longues ou courtes telles des mélopées ou des cris lorsqu’il le faut. De temps à autre, les scènes sont plus viriles, plus dures mais toujours se dégage la sérénité de celui qui peint, qui est le « témoin » vivant de ce qui se déroule sous ses yeux.
Peindre contre l’oubli….
On peut se demander ce qui a poussé cet homme en 1832 à abandonner une carrière d’avocat et de portraitiste, ainsi que femme et enfants pour aller à la rencontre de ces peuples indiens qu’il a choisi de représenter.
« Il rayonne » est une des explications… Je pense que Catlin s’est accompli dans cette œuvre gigantesque de «devoir de mémoire ». Expliquant ses premiers contacts (entre autres avec la langue des signes), ses premières approches (en faisant des dons), ses échecs (les indiens qui ne veulent pas être peints) , les cadeaux reçus (comme preuve de confiance d’une parole donnée)…… l’auteur nous fait découvrir le quotidien de l’artiste.
« Catlin travaille bien. Il est solide. Il sait ce qu’il aime, où il va. Depuis Philadelphie, il a tout quitté : position sociale, femme, aisance, il a accompli plus de quatre mille kilomètres précisément pour jouir de ce moment de capture et de création. »
Est-ce que le peintre aime les indiens ? Où est-ce qu’il aime poser ses pinceaux sur la toile pour inscrire leur histoire quelque part, laisser une trace ? En lisant ce roman, la réponse transpire entre les lignes …..
Ce livre est pour moi un coup de coeur.
Pour le sujet traité et ma tendresse particulière pour ses « oublié s ».
Pour l’écriture qui m’a transportée.
Pour le plaisir de cette lecture dont je me suis délectée, la faisant durer pour rester encore un peu avec chacun de ceux qui étaient évoqués….
Ecureuil agile *
* nom indien que m’ont choisi mes élèves lorsque nous avons lu « Petit Arbre ».
Titre : Bison
Auteur : Patrick Grainville
Editions : Points
Date de parution : Janvier 2015
Nombre de pages : 300 pages
ISBN : 9782757849538
Quatrième de couverture :
Enfin, les bisons sont arrivés. Armés d'arcs, parés d'amulettes et de plumes, les Sioux s'élancent et l'épopée commence. Sur la colline, George Catlin peint à toute vitesse pour garder la mémoire de ces peuples. Il le pressent : bientôt il n'y aura plus de bisons, plus d'Indiens libres. Les Blancs vont détruire leur vie nomade en harmonie avec la prairie, leurs fêtes, leur religion, leurs chasses…